article précédent : des Bantous aux Teutons
Connaissez-vous la théorie des six degrés de séparation ?
Nous serions reliés, d'une façon ou d'une autre, à tout autre de nos contemporains, par une chaîne relationnelle de six personnes au maximum.
De cette théorie est né un jeu totalement débridé : "les Six degrés de Kevin Bacon", consistant à trouver le lien le plus direct qui permettrait de relier l'acteur Kevin Bacon avec tout autre comédien, réalisateur, producteur ...
Ainsi, pour trouver le lien entre Elvis Presley et Kevin Bacon :
Elvis Presley a joué dans "Change of Habit" (1969) avec Edward Asner ; et le même Edward Asner jouait dans "JFK" (1991) avec... Kevin Bacon.
CQFD.
Eh bien, je vous propose de jouer de la même façon avec deux mots courants et bien connus.
Surtout pour vous qui lisez ce billet en ce moment ; vous allez vite comprendre !
Quels seraient les degrés de séparation (proto-indo-européens bien entendu !) entre...
"Souris" et "Web" ?
......
Allons-y, jouons :
"Souris" est un mot relativement récent, provenant du français médiéval soriz (1175).
En revanche, son nom scientifique est bien "mus musculus".
Et nous y retrouvons la racine proto-indo-européenne *mus- : souris, rat.
Qui a donné l'anglais mouse évidemment, ou même musaraigne (lit. : "souris-araignée", car longtemps réputée pour avoir une morsure aussi venimeuse que celle de l'araignée !).
Quant à lui, l'anglais "Web", provenant du verbe proto-indo-européen *webh- ("aller et venir", d'où "tisser", "natter", "tresser"), désigne "ce qui provient du métier à tisser", "le tissu", "ce qui est tissé".
"Web", en anglais, c'est donc la toile tissée.
Comme celle de l'araignée ("spider web": "toile d'araignée").
CQFD.
C'est tordu, certes, mais pas plus que la relation entre Kevin Bacon et Elvis Presley...
Mais revenons un instant sur la racine *mus- :
Saviez-vous que le latin musculus ("petite souris") a donné le mot "muscle" ?
Car un muscle au travail peut évoquer la forme oblongue d'une souris... !
C'est aussi cette racine indo-européenne *mus- qui a donné le grec myo, que l'on retrouve dans myocarde: le muscle cardiaque.
Cette façon de récupérer la racine désignant un objet X (ici *mus- désignant la souris), pour nommer un objet Y dont l'apparence physique rappelle l'objet X (en l'occurrence le muscle ressemblant à une souris) n'est pas rare.
Sur un plan strictement belgo-(ridiculo ?)-belge, onze Bart national(iste) a la réputation d'aimer les gaufres...
Mais quoi de plus naturel ! (pour tous les non-Belges, voici Bart)
Le nom "De Wever", issu de la racine *webh-, c'est "le tisserand" (même origine pour le nom de famille "Weber").
(Bien que, je vous l'accorde, onze Bart aimerait plutôt détisser que réellement "tisser").
Mais mon point n'est pas de comparer Bart à une gaufre...
Là où je veux en venir, c'est que le mot "gaufre" provient de la même source proto-indo-européenne *webh-, évoquant plus précisément ici "ce que l'abeille tisse, fabrique" : la structure en "nid d'abeille", le "rayon de miel" (l'allemand "Wabe" - le nid d'abeille, en est tiré).
Ce à quoi ressemble effectivement une gaufre... (Néerlandais "wafel", anglais "waffle"...)
un muscle ressemble à une souris => on le nomme d'après la souris
une gaufre ressemble à un nid d'abeille => on la nomme d'après le nid d'abeille
Tiens, curieux, me direz-vous, ce "g" français de "gaufre", que l'on retrouve sous la forme "w" en anglais dans "waffle"...
Oui et non : pensez aux paires "Guillaume - William", "garantie - warranty", "garder - to watch", "gaspiller - waste"...
Frieden Ricks
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