article précédent : Daisy au Bundestag
...Her mind is Tiffany-twisted, she got the Mercedes bends...
(...Elle est obsédée par Tiffany's, elle a les courbes d'une Mercedes...)
PS: Tiffany's c'est la célèbre et chicos bijouterie new-yorkaise devant laquelle Audrey Hepburn s'arrête pour déjeuner au petit matin après ses virées nocturnes dans Breakfast at Tiffany's de Blake Edwards (1961), tiré du roman du même nom de Truman Capote.
Devant la vitrine de Tiffany's |
La séquence d'ouverture
Quelle ambiance, avec la fantastique musique de Henry Mancini
Quelle ambiance, avec la fantastique musique de Henry Mancini
...Et Mercedes bends est un subtil(?) jeu de mots sur Benz (la marque) et bends: les courbes...
Le 21 juillet, c'est la fête nationale belge.
Et le 21, c'était juste hier... (enfin pour moi, en ce moment, aujourd'hui)
Que voilà un bon point de départ !
J'ai déjà traité des mots nation et belge, dans Tour de France et Tour de Babel...
En revanche, rien encore sur "fête".
Parfait, allons-y !
A l'origine du mot, une racine proto-indo-européenne évoquant des concepts religieux, liés à Dieu.
Ce qui a du sens dans une lointaine société indo-européenne traditionnelle, où l'Homme se sent encore part du "Grand Tout"; où la distinction entre sacré et profane n'a pas lieu, car "tout est sacré".
Où la fête est par définition sacrée, car s'inscrivant dans les grands cycles cosmiques.
Concepts que nous hommes occidentaux et modernes avons tant de mal à appréhender.
La racine dont il est question?
*dhēs-
On retrouve *dhēs- à la base d'une série de mots divers, relatifs à la vie religieuse, à la divinité.
La racine est étroitement apparentée à cet autre radical que l'on pourrait traduire par Dieu, que nous avons découvert dans By Jove, Olrik : *deywos.
Mais revenons à notre racine *dhēs-
*dhēs- se retrouve dans le latin fas, qui correspond à quelque chose comme "loi divine".
Sur fas sont construits les mots latins fēriae (les fêtes du calendrier religieux) et fēstus ("faste, propice, favorable").
Faste ne nous fait plus vraiment penser à "favorable", "en accord avec la loi divine".
Pourtant, il nous reste toujours son antonyme néfaste, provenant de nefas : tabou, interdit par les dieux.
De fas, nous avons encore le latin fanum: le temple, le lieu de culte.
Pas facile, de trouver des dérivés modernes de fanum? Mais si !
Le fanatique, c'est celui qui, étymologiquement est "inspiré, en délire, comme étaient les prêtres de Bellone (la déesse de la guerre) lors de leurs prédictions furieuses et extravagantes".
Juvénal dit encore que "le fanatique est piqué de l'aiguillon de Bellone".
Et puis, à l'inverse, il y a "profane", qui désigne celui qui est devant le temple, devant le lieu de culte.
Entendez : "devant, pas dedans", pas à l'intérieur, là où règne le sacré.
- Mon p'tit bonhomme, faudra p'têt voir à expliquer comment un *dh de ton proto-machin devient un "f" en latin...
- Très judicieuse suggestion!
Le "f" latin peut effectivement retranscrire le proto-indo-européen *dh.
On peut retrouver *dh en grec sous la forme "θ" (comme dans θεός - theos).
"θ" était une sorte de souffle émis entre les lèvres.
Son correspondant en latin sera un "f", surtout comme lettre initiale, ainsi qu'on le voit par les mots fumus, findo, facia, formus, fingo, fello, fores, suffire, fastus, rufus, qui ont tous un équivalent grec en θ.
D'ailleurs, des changements analogues ont lieu dans les langues modernes: ainsi en anglais, dans les mots three, through, nothing, un non-anglophone pourrait parfaitement entendre free, frough, nofing.
Et en russe, le nom propre Théodore est devenu... Фёдор: "Fiodor", que l'on transcrit souvent en français par Féodor, ou même Fédor.
En passant par le latin, *dhēs- nous a donné fête, festin, festif, festival, ou même le feston, cette guirlande ou faisceau de petites branches d’arbre, garnies de leurs feuilles et entremêlées de fleurs, de fruits, etc., qui sert ordinairement de décoration, et que l’on suspend alors par les extrémités, de manière que le milieu retombe.
D'autres dérivés?
Fiesta, ou Oktoberfest, ou le français foire ! Ou encore l'anglais fair (la fête, la foire)...
Pour terminer joliment, quelques prénoms issus de *dhēs-?
Bonne fête à tous les Belges !
L'union fait la force !
Frédéric
Juvénal dit encore que "le fanatique est piqué de l'aiguillon de Bellone".
Decimus Iunius Iuvenalis, dit Juvénal |
L'effrayante Bellone |
Et puis, à l'inverse, il y a "profane", qui désigne celui qui est devant le temple, devant le lieu de culte.
Entendez : "devant, pas dedans", pas à l'intérieur, là où règne le sacré.
- Mon p'tit bonhomme, faudra p'têt voir à expliquer comment un *dh de ton proto-machin devient un "f" en latin...
- Très judicieuse suggestion!
Le "f" latin peut effectivement retranscrire le proto-indo-européen *dh.
On peut retrouver *dh en grec sous la forme "θ" (comme dans θεός - theos).
"θ" était une sorte de souffle émis entre les lèvres.
Son correspondant en latin sera un "f", surtout comme lettre initiale, ainsi qu'on le voit par les mots fumus, findo, facia, formus, fingo, fello, fores, suffire, fastus, rufus, qui ont tous un équivalent grec en θ.
D'ailleurs, des changements analogues ont lieu dans les langues modernes: ainsi en anglais, dans les mots three, through, nothing, un non-anglophone pourrait parfaitement entendre free, frough, nofing.
Et en russe, le nom propre Théodore est devenu... Фёдор: "Fiodor", que l'on transcrit souvent en français par Féodor, ou même Fédor.
En passant par le latin, *dhēs- nous a donné fête, festin, festif, festival, ou même le feston, cette guirlande ou faisceau de petites branches d’arbre, garnies de leurs feuilles et entremêlées de fleurs, de fruits, etc., qui sert ordinairement de décoration, et que l’on suspend alors par les extrémités, de manière que le milieu retombe.
feston |
D'autres dérivés?
Fiesta, ou Oktoberfest, ou le français foire ! Ou encore l'anglais fair (la fête, la foire)...
Les Oktoberfest sont réputées pour leurs énormes... verres de bière. |
Mais sous une forme suffixée en -o et au degré zéro, la racine, devenue *dhəs-o,
nous a légué plusieurs mots se rapportant tous à son origine sacrée,
par le grec θεός - theos, Dieu :
nous a légué plusieurs mots se rapportant tous à son origine sacrée,
par le grec θεός - theos, Dieu :
- L'apothéose, c'est à l'origine la déification des empereurs romains après leur mort.
Ingres: l'Apothéose d'Homère |
- Enthousiasme (du grec ancien ἐνθουσιασμός - enthousiasmós) signifiait à l'origine inspiration ou possession par le divin ou par la présence d'un dieu ; le terme sous-entend une communication divine.
- Le panthéon, c'est "ce qui est commun à tous les dieux", le temple de tous les Dieux.
Pour terminer joliment, quelques prénoms issus de *dhēs-?
- Dorothée, Dorothy, Théodore, veulent dire "don de Dieu", où l'on retrouve la racine *dhēs- flanquée de la racine *dō-, reprenant le sens de donner.
Judy Garland: Dorothy dans The Wizard of Oz, 1939 |
- Timothée, c'est celui qui honore Dieu...
- Quant à Tiffany, le mot provient de Θεοφάνια - Theophaneia (théophanie): "apparence ou manifestation de Dieu".
Tiffany & Co., New-York City |
Théophanie: Le Baptême du Christ, XVe siècle (école de Novgorod) |
Bonne fête à tous les Belges !
L'union fait la force !
Frédéric
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2 commentaires:
Commencer avec la belle Audrey dans "Breakfast at Tiffany», passez à la Californie et finir avec un enorme verre de bière, c´est une Odyssée magnifique ... Et tout en apprenant sur les origines de mots! Merci cher mon ami!
:-)) Merci à toi Armando!!
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