article précédent : -Au nord, c'était les... -NON. -Mais enfin ?-NON. Non non. Non. NON.
“(…) il lui avait inoculé le virus redoutable de sa vertu ;
il lui avait infusé dans les veines sa conviction, sa conscience, son idéal (…)”
Victor Hugo,
dans
Quatrevingt-treize,
son tout dernier roman,
dont l'action se situe vers... 1793, du temps de la Terreur.
Nonante-trois aurait été très bien aussi, notez.
Bonjour à toutes et tous !il lui avait infusé dans les veines sa conviction, sa conscience, son idéal (…)”
Victor Hugo,
dans
Quatrevingt-treize,
son tout dernier roman,
dont l'action se situe vers... 1793, du temps de la Terreur.
Nonante-trois aurait été très bien aussi, notez.
En ce dimanche confiné, nous continuons la grrrrrande étude, que dis-je, la saga que nous avons consacrée à l'étymologie de... coronavirus.
Cette palpitante odyssée avait commencé avec
Le Corbeau et le Renard, c'est de Corneille ?,
et s'était poursuivie avec
-Au nord, c'était les... -NON. -Mais enfin ?-NON. Non non. Non. NON..
Aujourd'hui, pour l'avant-dernier chapitre de cette monumentale somme, nous parlerons du deuxième terme du composé corona-virus..., v...
- allez, un effort !
- vi...
- OUIIIII ! -
virus.
Pour rappel, nous savons déjà que corona- nous arrive,
par le latin corōna, “guirlande, couronne...”,
du grec ancien κορώνη, korṓnē, “quelque chose de courbé...”, issu, lui,
de la racine indo-européenne *kor-u/n-, qui désignait le corbeau.
racine indo-européenne *kor-u/n-, “corbeau”
⇓
grec ancien κορώνη, korṓnē, “quelque chose de courbé...”
⇓
emprunt
⇓
latin corōna, “guirlande, couronne...”
⇓
emprunt savant (années 1960)
⇓
français corona- dans le composé coronavirus
grec ancien κορώνη, korṓnē, “quelque chose de courbé...”
⇓
emprunt
⇓
latin corōna, “guirlande, couronne...”
⇓
emprunt savant (années 1960)
⇓
français corona- dans le composé coronavirus
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Intéressons-nous donc à présent à ce deuxième élément, -virus.
Il s'agit, encore une fois, d'un emprunt au latin.
Relativement récent, l'emprunt, car attesté seulement en 1478 (septante-huit).
Le vīrus latin pouvait désigner plein de choses, mais qui avaient toutes en commun, disons...
une certaine odeur,
une viscosité particulière ?
Au nombre des acceptions de vīrus, l'on trouvait ainsi :
- odeur forte, désagréable, puanteur,
- semence animale, sperme,
- goût désagréable,
- poison, venin,
- suc des plantes (lui-même servant souvent de poison),
- teinture de pourpre (mais oui, obtenue par extraction et putréfaction à l'air libre des sécrétions d'un mollusque, le murex. Le lien ? L'odeur abominable)
- forte odeur épicée,
- liquide visqueux, gluant... (comme la bave des limaçons),
- ...
le gomphide glutineux (source) |
Au figuré, vīrus signifiait encore amertume, âcreté, venin, fiel...
En français, le mot désignera une substance organique, comme le pus
- ouais, je sais -,
susceptible de transmettre une maladie, une infection.
Ensuite, fin du XVIIème, il servira à désigner plus précisément une toxine, un agent de contagion (même si on ne savait pas trop à quel facteur attribuer cette contagion).
On parlait déjà du virus de la rage, mais on employait surtout le mot à propos des maladies vénériennes, réputées particulièrement impures.
Au sens figuré, le mot s'emploiera, dès le XVIIIème, pour désigner un principe moral de contagion. C'est encore sous ce sens que Victor Hugo l'utilisera dans Quatrevingt-treize, paru en 1874 (dix-huit cent septante-quatre).
En 1925, il est attesté comme l'équivalent de passion, dans l'expression virus de la lecture.
Mais revenons au sens propre de virus...
Au début du XXème, le terme va se spécialiser pour désigner un micro-organisme, qui, s'il était encore mal connu, était en tout cas nettement plus petit que les microbes et bactéries.
On parlait d'ailleurs de virus filtrants, dans la mesure où seuls ces micro-organismes passaient à travers les filtres.
Saloperies.
Le sens moderne de virus, datant du XXème siècle, nous le devons à la recherche biologique et médicale :
Micro-organisme infectieux, parasite absolu des cellules vivantes, possédant un seul type d'acide nucléique et synthétisant sa propre substance à partir de son seul stock génétique (sans échange métabolique).
Merci, merci, © 2017 Dictionnaires Le Robert - Le Grand Robert de la langue française
Voilà pour l'évolution du mot en français, à partir de son emprunt au latin.
Mais... D'où qu'i' v'nait, le latin vīrus, hein ?
Michiel de Vaan,
dans son Etymological Dictionary of Latin and the other Italic Languages,
nous raconte que le latin vīrus est issu d'un étymon italique qu'il retranscrit sous la forme
*weis-o-(s-),
et à qui il attribue le sens de... poison.
Eh oui, ce passage de s à r entre deux voyelles est un bel exemple de rhotacisme.
En cas de doute sur le rhotacisme, allez donc lire rhotacisme? Moi je n'aime pas ce garçon.
Vous êtes confinés ; profitez-en.
Quant à l'étymon proto-italique *weis-o-(s-)
- toujours selon de Vaan -il est issu d'une forme indo-européenne de même sens (poison, hein) qui donnait
*ueis- au nominatif,
et
*uis-os- au génitif.
Mais... - me direz-vous -, pourquoi diable insister sur ces deux formes ?
Faut-il vraiment faire si grand cas de ces deux... euh... cas ?
Le souci, voyez-vous, c'est qu'on explique difficilement cette forme latine, comparée à ses différents cognats
- cognats que vous trouverez en grec ancien, en gallois, en moyen irlandais, en sanskrit, en avestique, ou alors - soyons fous - en tokharien. A et B, excusez du peu.
Il se pourrait que pour une raison encore inconnue, le latin,
par l'entremise de l'italique *weis-o-(s-),ait choisi la forme nominative indo-européenne *ueis- pour en faire son vīrus,
alors que tous les autres cognats seraient issus, eux, du radical présent dans les cas autres que le nominatif (entendez les cas obliques), *uis-...
Vous l'avez deviné...
La semaine prochaine, nous nous pencherons sur tous ces cognats du latin vīrus, du gallois au tokharien B.
La semaine prochaine, nous nous pencherons sur tous ces cognats du latin vīrus, du gallois au tokharien B.
Résumons l'article du jour, et puis, disons-nous au revoir...
**********
forme indo-européenne nominative *ueis-, “poison”
⇓
rhotacisme
⇓
latin vīrus, “visqueux et puant : suc des plantes, semence animale...”
⇓
emprunt (1478)
⇓
français virus
étymon proto-italique *weis-o-(s-), “poison”
⇓rhotacisme
⇓
latin vīrus, “visqueux et puant : suc des plantes, semence animale...”
⇓
emprunt (1478)
⇓
français virus
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Chères lectrices, chers lecteurs,
surtout, surtout,
protégez-vous bien.
Portez-vous bien.
Et tenez bon !
surtout, surtout,
protégez-vous bien.
Portez-vous bien.
Et tenez bon !
Frédéric
Spécial confinement :
Le Getty, le J. Paul Getty Museum de Los Angeles, fermé lui aussi pour cause de confinement, propose un petit jeu aux amateurs d'art : refaire, avec les moyens du bord - les objets de la maison -, les oeuvres d'art qu'il héberge.
Et certains résultats sont fantastiques !
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Attention,
ne vous laissez pas abuser par son nom :
on peut lire le dimanche indo-européen
CHAQUE JOUR de la semaine.
(Mais de toute façon,
avec le dimanche indo-européen,
c’est TOUS LES JOURS dimanche…)
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Et pour nous quitter,
mais sans tout à fait quitter la Rome Antique,
et surtout en pensée avec nos amis Italiens,
un air déchirant, un cri poignant,
celui de Cléopâtre à Jules César,
tiré de
Giulio Cesare in Egitto, HWV 17
opéra (opera seria) que composa Georg Friedrich Haendel en 1723,
“ Se pietà di me non senti”
(Si tu n’as pas pitié de moi).
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4 commentaires:
Très pédagogique. Je pense que même ceux qui sont peu ou pas initiés peuvent suivre. Un petit mot supplémentaire pour votre liste (il ne me semble pas l'avoir vu): κορωνίς, la coronis, signe diacritique recourbé et ressemblant à un esprit doux, qui en grec ancien servait à signaler une crase.
Merci, Giellesse !
Et grand merci pour votre contribution, bienvenue . On peut encore en trouver d'autres, en effet !
En recherchant κορωνίς, la coronis ("signe diacritique recourbé et ressemblant à un esprit doux, qui en grec ancien servait à signaler une crase") et le sens d'"esprit doux" et de "crase" (excusez mon écolage moderne et flamand), je suis tombé sur les légendes de la mythologie grecque :
- Coronis fille de Phlégias et la mère d'Asclépios (dieu de la médecine),
- Coronis fille de Coronée,
- Coronis, une des Hyades, fille d'Atlas, nourrice de Dionysos.
Que le nom soit associé à koroné (corneille) ne devrait pas surprendre ...
Dans le premier cas elle a le surnom Coronis, en raison de sa beauté (vraiment ?). Le corbeau (ne serait-ce pas plutôt une corneille ?) qui devait la surveiller était d'abord tout blanc et que, par punition, il sera coloré tout noir par Apollon.
La deuxième est changée en corneille par Athéna afin de lui permettre d'échapper aux poursuites incessantes de Poséidon qui en était tombé éperdument amoureux.
Les parents de la troisième devaient en avoir ras le bol de ses pleurnicheries.
Pour en revenir à la coronis, le signe diacritique, il est intéressant qu'il soit recourbé tel le bec du corbeau.
Un exemple d'une crase en français? en les → ès crase
Merci Frédéric et bonne semaine à tou(te)s.
Eh ben, Thierry, respect !!!
Grand merci pour ta contribution,
Porte-toi bien !
Bein à toi
Frédéric
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